Américain au ketchup

AMERICAIN AU KETCHUP !
Durant toutes ces années, je me suis occupé de lui.
J’ai consacré plus de trente ans de ma propre vie,

pour satisfaire ses quatre volontés, et il y en avaient,
moi, incapable de comprendre ce qu’il me demandait.

Cet américain ne faisait aucun effort pour que son parler
puisse être perçu comme un langage un peu moins étranger.

En même temps que sa chiquelette, ses mots il a mâché,
et chaque fois que je me trompais, il s’est violemment fâché.

Je me demande souvent pourquoi je ne l’ai jamais lâché.
Il avait le don de faire le vide autour de lui, de seul se retrouver.

J’ai considéré que sur terre, c’était ce que je devais endurer.
A cause de cela, entre autre, je ne me suis jamais marié.

Le tiers de ma vie entière, je la lui aurai entièrement consacrée.
Ainsi, devrais- je avoir un énorme bonus de bontés récupérées.

Tellement, durant ce tiers de siècle avec lui, j’en ai bavé.
Pourquoi n’ai-je jamais pu, une seule fois, lui en parler ?

C’est sur son lit de mort, n’y tenant plus, je lui ai expliqué
que jamais, ce qu’il me disait ou me demandait, j’avais pigé.

Alors, tout repentant, de sa voix, à peine audible de fausset :
Eusse t’il été préférable que je vous parlasse en français ?
16.09.2006